Login

« 140 LAITIÈRES PÂTURENT MALGRÉ DES SOLS PEU PORTANTS »

« Quand nous avons bien géré le pâturage, les refus sont rares. Sur toute l'année 2014, nous n'avons eu que 7 t de refus sur la centaine d'hectares attribués aux laitières », explique Philippe Barbier.© E.A.

Face à des terres peu propices au pâturage, les associés du Gaec de Séville ont contrecarré en adaptant les surfaces pâturées à la pousse de l'herbe et à la pluviométrie.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

MÊME DRAINÉS, DES SOLS HUMIDES RESTENT UN VÉRITABLE PROBLÈME pour faire pâturer. Surtout quand on compte 140 laitières, comme au Gaec de Séville. Malgré la taille du troupeau, il n'a jamais été question de se priver de valoriser l'herbe sur pied, d'autant que le lait est transformé en emmental grand cru label rouge. Et pourtant, les systèmes de pâturage les plus répandus sont difficilement applicables ici. « Nous avons essayé de faire du pâturage tournant dynamique pour maximiser la production d'herbe, explique Philippe Barbier, l'un des quatre associés. Mais nos terres argileuses et peu portantes n'ont pas supporté un chargement trop élevé. D'ailleurs, personne n'en fait dans notre région. »

Pour exploiter au mieux l'herbe, un système tournant avec de grandes parcelles a été mis en place. Les laitières ont à leur disposition 101 ha, répartis en cinq parcelles de 12, 14, 18, 27 et 30 ha. Selon la météo et la pousse de l'herbe, le scénario varie tous les ans.

« Cette année, nous avons sorti les vaches le 15 mars sur trois parcelles (14, 27 et 30 ha) pour déprimer, explique Philippe. Nous avons dû les rentrer pendant une semaine à cause de la pluie. Après, elles ont été pendant quelques semaines dans les parcelles de 14 et 18 ha, parfois juste un après-midi pour limiter le piétinement. »

Jusqu'à la récolte, elles tourneront dans les parcelles de 14 et 27 ha, ce qui permettra de faucher les autres le plus tôt possible. « À partir de mai, dès qu'il y a une fenêtre météo qui s'y prête, nous fauchons et enrubannons, quel que soit le volume d'herbe, pour mettre les vaches rapidement dessus. Ensuite, nous adaptons la taille de la parcelle attribuée à la pousse de l'herbe. Les vaches ont toujours à disposition du foin. Quand elles se mettent à en manger, c'est signe qu'il n'y a plus assez d'herbe. Au contraire, quand la pousse est bonne, nous diminuons les surfaces afin de faucher au maximum car nous avons de forts besoins en foin. Pour éviter les refus et maintenir la production, les taries pâturent certaines parcelles après les vaches laitières. »

« LES REFUS SONT PRESSÉS POUR SERVIR DE LITIÈRE »

Sur les parcelles non accessibles aux taries, les refus sont fauchés et pressés pour servir de litière. « Le broyeur abîme l'herbe et sa repousse n'est pas bonne. De plus, si nous les laissions sur place, nous mélangerions le bon et le mauvais, ce qui limiterait l'ingestion. Quand nous avons bien géré le pâturage, les refus sont rares. En 2014, nous n'avons eu que 7 tonnes de refus sur la centaine d'hectares attribués aux vaches laitières. »

Les prairies contiennent naturellement des légumineuses, résultat d'une fertilisation exclusive avec du fumier composté. Encouragés par la nouvelle Pac, les associés ont mis en place 15 ha supplémentaires d'herbe cette année. « Autant mettre à profit au maximum la Pac quand elle est avantageuse, lance Philippe. L'herbe reste moins coûteuse à produire et nécessite moins de travail qu'un système maïs intégral. »

« NOTRE PRINCIPE : LÂCHER TÔT, RENTRER TÔT »

L'humidité des sols limite le pâturage d'automne. « Le risque de piétinement est très élevé. Si une terre est brisée à cette saison, nous la retrouverons dans le même état au printemps, explique Philippe. En plus, l'herbe n'est plus très appétente. »

Au 10 novembre, l'ensemble du troupeau est rentré. Pour compenser, les vaches laitières sortent en pâture le plus tôt possible, dès la mi-mars, juste pour la journée au début, quitte à devoir les rentrer en cas de fortes pluies. À la pâture, les laitières ont toujours du foin à volonté et reçoivent au maximum, pour les meilleures, 6 kg de concentré de production sans tourteau (triticale, orge et maïs grain autoconsommés). « La distribution du concentré en salle de traite, à raison de 1 kg pour 2,8 l, gérée en fonction des performances individuelles, se cale sur une herbe capable au printemps de couvrir 20 kg de lait et, en fin de saison, 16 kg, explique Philippe. Toutes les vaches ont au minimum 400 g/j, ne serait-ce que pour les faire entrer en salle de traite. Nous donnons également un peu plus de concentré à celles qui manquent d'état. Nous utilisons cette ration tant qu'il y a de l'herbe. Elle est très économe et réduit le coût alimentaire moyen sur l'année à 110 €/1 000 litres de lait. »

Au 1er septembre, les vaches ne sortent plus qu'en journée pour les inciter à manger du foin la nuit. « Sinon, elles préféreraient être dehors, même sans herbe. Ce choix ne permet pas d'exploiter au maximum le potentiel de rendement de l'herbe. Mais il concilie un faible coût alimentaire, le maintien du niveau de production autour de 6 700 kg/VL et la qualité du foin, tout en étant assez simple à gérer. Si nous avions moins de surfaces, nous devrions probablement opter pour un système moins économe. Notre chance est peut-être également de ne pas avoir pris le chemin de l'intensification à outrance, synonyme de lourds investissements. Cela nous autorise plus de souplesse dans notre fonctionnement. »

ÉMILIE AUVRAY

Nettoyage de printemps. À chaque mise à l'herbe, l'intégralité des bâtiments est nettoyée au jet à haute pression. Pour travailler en toute sécurité en hauteur, les associés ont bricolé à partir d'une palette et d'une cage grillagée pour aliment liquide, une nacelle de sécurité qui s'adapte sur le télescopique.

© E.A.

Un passage canadien économique. En guise de tubes métalliques, de simples poteaux en bois posés en quinconce au sol font ici office de passage canadien, qui évite d'avoir à descendre du quad pour ouvrir une clôture.

© E.A.

© E.A.

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement